Connectez-vous avec nous

Bonjour, que cherchez-vous ?

Actus

Jane Meuke : le combat d’une vie

Jane Meuke a fait de son expérience personnelle une lutte. Avec son association, elle se bat pour une meilleure prise en charge de l’handiparentalité et des handicaps invisibles.

Le 21 avril, avec son association, Jane Meuke a organisé une marche solidaire pour sensibiliser aux problématiques d’accessibilité. Photo Emmanuel Foudrot

«Tu as mal, mais tu dois réussir ». Cette phrase, Jane Meuke se l’est répétée à de nombreuses reprises au cours de sa vie. Installée depuis dix ans à Vénissieux, cette jeune femme de 41 ans, « passionnée par la découverte » et dotée de multiples diplômes, est atteinte de plusieurs pathologies chroniques handicapantes : spondylarthrite ankylosante axiale et périphérique, rhumatisme psoriasique et fibromyalgie.

Pendant plus de vingt ans, elle a vécu dans la souffrance, sans savoir de quels maux elle était atteinte. « J’ai commencé à avoir des douleurs chroniques à l’âge de 10 ans, explique Jane. J’avais mal à la nuque et dans les épaules, tous les petits bruits devenaient insupportables. J’avais une hypersensibilité impressionnante. » Malgré des examens médicaux, personne ne trouve la cause de ses souffrances. On lui parle de migraine, de surmenage. « Ma famille n’acceptait pas ce diagnostic, on m’a dit que ça s’arrêterait tout seul, et j’y ai cru. J’ai donc grandi en souffrant, car il n’y avait pas de place pour la parole. »

Après avoir terminé ses études supérieures, elle devient cheffe de projet en informatique décisionnelle. Mais les douleurs sont toujours là et commencent à affecter l’ensemble de son corps, puis de nouveaux symptômes apparaissent. « Quand je me levais le matin, j’avais l’impression qu’un camion me broyait les articulations. » Pourtant, elle admet ne pas avoir consulté de spécialiste pour identifier l’origine de son mal-être, malgré l’insistance de celui qui est aujourd’hui son mari : « Vu que les examens n’avaient rien donné quand j’étais petite, je pensais que je n’en avais pas besoin. Je consultais des médecins mais je ne faisais pas état de mon vécu. Je n’ai pas bénéficié d’un travail de fond parce que je ne le demandais pas et que je n’en parlais pas. »

« Je n’arrivais plus à marcher »

Elle continue donc sa vie, avec ses maux qui lui détruisent le corps. Elle tombe enceinte et les souffrances s’intensifient encore. « Je n’arrivais plus à marcher, mais j’ai poursuivi ma grossesse car on me disait que c’était “normal d’avoir mal”. Peu de temps après, j’ai eu un deuxième enfant, je change de gynécologue et là, il reconnaît ma détresse. » Mais aucun diagnostic n’est posé.

Des médecins viennent alors régulièrement lui faire des injections contre les douleurs pendant la nuit. Un jour, l’un d’eux évoque l’hypothèse d’une spondylarthrite ankylosante. Jane décide de faire des recherches sur Internet pour en savoir plus. « Tout ce qui était décrit correspondait à ce que j’avais, comme si j’avais moi-même écrit l’article. » Elle consulte ensuite un rhumatologue qui confirme le diagnostic.

« Mes émotions étaient partagées. J’étais heureuse mais je ne savais pas pourquoi, et j’ai compris que je ressentais du soulagement. Cela confirmait que je n’étais pas folle et que j’avais une vraie maladie, et pas des moindres. C’est une pathologie inflammatoire chronique, évolutive car dégénérative. Elle touche mes articulations : les sacro-iliaques, la colonne vertébrale, peut également affecter les périphéries comme les mains et les pieds. »

Photo Emmanuel Foudrot

Ses deux autres handicaps se déclenchent peu à peu et, comme si cela ne suffisait pas, une hypersensibilité médicamenteuse apparaît suite à une allergie au traitement qu’on lui prescrivait contre la spondylarthrite ankylosante. Depuis, elle n’a toujours pas de prescription qui lui convienne : « Encore aujourd’hui, mes traitements peuvent changer, car je ne les supporte pas. » Toutes ces épreuves ont durement touché Jane Meuke. « Je me suis souvent demandé “c’est quoi cette vie ? J’ai toujours quelque chose, personne ne sait ce que c’est, personne ne me soulage”. J’étais à terre moralement. Puis je me suis dit qu’on pouvait tirer du positif dans tout ça, en faire une force. »

Une histoire familiale

Grâce à sa combativité et avec le soutien de ses enfants et de son mari, elle réussit à remonter la pente. En 2023, ils créent ensemble l’association Actionvisible & handicap. « On souhaitait faire quelque chose en lien avec mon parcours et mes maladies. » L’objectif est de sensibiliser aux handicaps invisibles et d’inciter à la bienveillance et à l’inclusion. « Il faut que l’information soit accessible. De nombreuses solutions existent, mais elles restent peu connues. » Avec son expérience dans le domaine de l’informatique, Jane a créé une base de données regroupant toutes les innovations technologiques et les thérapies alternatives non médicamenteuses, Les pages violettes. L’association compte 40 membres actifs et une centaine de bénévoles impliqués dans l’ensemble de ses actions.

En plus d’Actionvisible & handicap, Jane a récemment repris ses études avec l’objectif d’obtenir un diplôme universitaire en droits fondamentaux et inclusion sociale des personnes en situation de handicap. Son mémoire porte sur l’handiparentalité, autre combat qui lui tient particulièrement à cœur. « On parle des adultes ou des enfants en situation de handicap, des parents d’enfants en situation de handicap, mais jamais des parents handicapés. Avec tout ce que j’ai traversé, je me suis dit qu’il fallait en parler. »

Très peu d’informations existent sur le sujet. Alors pour venir en aide aux parents dans la même situation qu’elle, Jane a décidé de créer Handiparentalité 69, un collectif qui permet de trouver un espace pour échanger, regagner confiance. « Je ne peux pas m’occuper de mes enfants, je dépends surtout de mon mari, c’est très violent psychologiquement. Parfois, on se demande pourquoi on a fait des enfants, si on va être capable de s’en occuper, ce qu’on va leur transmettre. »

« La loi de 2005 aborde l’inclusion des personnes en situation de handicap, continue-t-elle. On a le droit à la vie, à la parentalité, mais on n’a aucune aide pour la mener à bien avec tout ce que cela implique. » En 2021, le Service d’Accompagnement à la Parentalité des Personnes en situation de Handicap (SAPPH) a été créé mais il n’est pas encore déployé dans toute la France. « C’est une avancée mais c’est encore très récent, observe Jane. Cela va prendre encore beaucoup de temps pour que la situation évolue. »

Pour en savoir plus sur les différentes actions de l’association, rendez-vous sur le site.

Cliquer pour commenter

Laissez un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous aimerez également

Actus

À partir du 13 mai, suite à des fraudes, les soins prodigués au centre dentaire des Minguettes ne seront plus remboursés que très partiellement...

Actus

Dans un entretien pour Expressions, Stéphan de Butler d’Ormond, président de l'hôpital, présente la nouvelle organisation des urgences.

Actus

Pour un podcast sur la parentalité et le handicap, Actionvisible & handicap recherche des parents prêts à témoigner.

Actus

Lancé à Vénissieux en 2022, le programme Mental city jeunes vise à renforcer la prévention et la promotion de la santé mentale des jeunes.

Actus

Pour faire face à la pénurie de médecins et aux difficultés d’approvisionnement de certains médicaments, les pharmacies voient leurs missions évoluer.