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Le Top à l’âge de la majorité

Nous avons suivi les agents de l’Office public de la Tranquillité (Top) dans leurs missions. Immersion dans un service axé sur la prévention et la surveillance des installations municipales, qui associe présence journalière sur le terrain et accueil téléphonique 24 heures sur 24.


Ils veillent sur la Ville – Le 13 septembre, nous avons suivi les agents de l’Office public de la Tranquillité (Top) dans leurs missions. Immersion dans un service axé sur la prévention et la surveillance des installations municipales, qui associe présence journalière sur le terrain et accueil téléphonique 24 heures sur 24.

Repères

Créé en mai 2000 avec le statut de régie autonome, puis municipalisé en 2012, l’Office public de la tranquillité (TOP) est rattaché à la Direction unique prévention sécurité (DUPS). Il dispose de deux véhicules, de radios dont les fréquences sont différentes de celles de la police municipale, ainsi que de ses propres locaux au sein de la DUPS.
En 2017, le standard du Top a traité 3 617 appels. 850 concernaient la tranquillité et la sécurité, 700 étaient d’ordre technique, 550 étaient liés au stationnement. Sur le terrain, les agents traitent entre cinq et dix affaires par semaine, des plus banales aux plus graves. L’accueil téléphonique fonctionne 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Les agents sont présents sur le terrain du lundi au samedi, de 10 heures à 18 heures.
Pour joindre le standard du TOP, composer le 04 72 51 52 53.

Il est un peu plus de dix heures, ce jeudi matin. Dans les locaux de la DUPS (Direction unique prévention sécurité), les agents du Top préparent leurs rondes. Au programme de l’équipage motorisé : le marché des Minguettes, une sortie d’école et la visite d’un possible lieu de squat au Moulin-à-Vent pour l’équipage motorisé.
En voiture. « On ne fait pas les sorties d’écoles selon un ordre préétabli. Ils sont choisis en fonction de l’actualité. Ou parfois ce sont des chefs d’établissements qui nous demandent de passer. Quoi qu’il en soit, toutes les écoles doivent faire l’objet d’un passage chaque mois », explique Aude en bouclant sa ceinture. « Le mot le plus important, c’est « adaptation », enchaîne Ahmed en prenant le volant. Certaines missions sont récurrentes, comme les marchés (N.D.L.R. : cinq par semaine) ou les sorties d’écoles. Mais pour le reste, on s’adapte. » Aujourd’hui, c’est Aude qui sera en charge de la « main courante », le document qui répertorie les interventions de la journée. Il fera l’objet d’une synthèse le lendemain à 6 heures par un autre agent, conjointement avec celle du standard.

Arrivés au marché des Minguettes, les agents entament leur ronde à pied. Objectif : vérifier que les accès sont fonctionnels, gérer d’éventuels malaises, signaler la présence de pickpockets, intervenir en cas d’altercation avec les forains ou entre clients, avant de revenir plus tard vérifier que les marchands ont laissé les lieux en état. Mais aujourd’hui tout est calme. Juste un coup de téléphone à la police municipale pour signaler des stationnements illicites. « La semaine dernière, nous avons trouvé une personne inconsciente dont l’époux avait déjà contacté les pompiers, raconte Aude. Les urgences étaient déjà prévenues. Nous avons sécurisé les lieux et appelé la police municipale pour évacuer les voitures afin que les pompiers puissent accéder à la victime. Mais nous sommes également formés aux premiers secours. » La ronde se poursuit. Quelques mots avec des commerçants ou des usagers du marché, puis retour à la voiture. Les agents mettent le cap sur la rue Gustave-Courbet, où une trentaine de petites maisons désormais murées attendent la démolition sous le regard désabusé du dernier locataire du lieu. « On vérifie que tout est bien fermé, que rien n’a été dégradé, on note la présence de dépôts sauvages, d’animaux morts ou de traces de squat ou même de braconnage. Et au besoin on appelle les services concernés », détaille Ahmed.

« Les trafics, c’est l’affaire de la police »
Il est presque midi, nous partons pour l’école Anatole-France. « Les écoles nous contactent lorsqu’un enfant n’a pas été récupéré. Dans ces cas, nous essayons de contacter la famille, soit en les appelant, soit en se rendant chez eux, reprend Aude lorsque nous arrivons sur place. Nous surveillons aussi les abords. C’est une présence qui rassure les habitants, ils savent que nous représentons la mairie, que nous sommes des médiateurs et non des auxiliaires de police. En fait on a un œil sur tout, mais dans une optique de prévention. » Et c’est bien ce qui leur confère une véritable autorité. « Souvent les gens préfèrent faire ce qu’on leur dit plutôt que d’avoir affaire à la police. » D’ailleurs, lorsque les agents du Top s’intéressent aux problèmes de drogue, c’est toujours et encore dans une optique de prévention. « La lutte contre les trafics, c’est l’affaire de la police, pas la nôtre. Et c’est aussi ce qui nous permet de rentrer plus facilement dans les quartiers. Tout le monde sait qu’on ne fait pas de répression », tranche Gregory.

Rien à signaler pour l’instant. Un chien court dans le parc qui jouxte l’école, mais son maître n’est pas loin. Un enfant semble seul dans la cour. Où sont ses parents ? Ils arrivent finalement. Pas non plus de scooter ni de moto-cross pour déranger les habitants, « un sujet délicat, surtout quand ils sont plusieurs », souligne Gregory. Vers 13 heures, nous nous retrouvons à l’autre bout de la ville, dans un ancien jardin ouvrier situé près de Carrefour. À l’intérieur d’une vieille cabane perdue au milieu des mauvaises herbes et des restes d’un grand potager, les agents remarquent quelques traces de vie. Des jouets, quelques vêtements et objets du quotidien… mais pas âme qui vive. Un peu plus loin, des morceaux de bois brûlés, des bouteilles vides et quelques disques CD témoignent d’une soirée récente et bien arrosée. « Ce sont principalement des squats festifs qui ont lieu la nuit, témoigne Ahmed. Des jeunes organisent des barbecues le soir, mais ils ne sont pas agressifs. J’en ai rencontré trois fois et je leur ai demandé de partir, ce qu’ils ont fait sans poser de problème. » Parfois, dans ce genre de lieux, les agents peuvent croiser des personnes sans domicile fixe. Qui seront redirigées vers les services sociaux de la Ville. Une demi-heure plus tard, nous voici au cimetière de Vénissieux. Personne a priori — cela s’est déjà vu — ne cherche à dégrader les tombes ni à voler des fleurs. Retour à la DUPS.

Une présence continue
L’après-midi, tandis que les agents repartent sur le terrain, nous rencontrons Fatima, chargée de la réception des appels au Top. « Au standard, il y a toujours quelqu’un pour répondre puisque nous travaillons en 3×8, sourit-elle. La difficulté, c’est de travailler seul et de se retrouver parfois face à des situations difficiles. Mais nous sommes formés pour cela. » Et de fait, certains appels font froid dans le dos. « Ce qui me marque le plus, ce sont les enfants que l’on oublie à l’école ou que les parents ne retrouvent pas, confie cette ancienne enseignante. Je me souviens notamment d’un père qui nous a appelés un soir pour nous dire que sa fille n’était pas rentrée du lycée. Heureusement, c’était une fausse alerte. » Et d’évoquer aussi des appels liés à des conflits conjugaux, des violences familiales. La misère sociale ou affective n’est jamais bien loin. La plupart des sollicitations sont toutefois d’ordre technique, par exemple des appels d’autres services de la Ville suite à des alarmes déclenchées par erreur, des animaux morts trouvés sur le trottoir ou des équipements municipaux endommagés.

Cette nuit, le Top sera de nouveau à l’écoute. Comme toutes les nuits depuis dix-huit ans.


Des agents aux profils variés

Les agents alternent dans la mesure du possible les missions sur le terrain et au standard. Tous ont suivi une formation liée à la gestion et à la prévention des conflits, ainsi qu’au fonctionnement des institutions. Mais leurs profils sont divers : si certains ont un passé professionnel dans l’animation, d’autres possèdent des compétences plus techniques. « Le socle commun, c’est la capacité à dialoguer, à garder son calme. Mais parmi nous, certains ont été militaires, routiers, animateurs ou infographistes, explique un agent. Nous disposons ainsi de tout un panel de profils, d’âges et de provenances qui permet aux agents de faire face à toutes les situations. »

Questions à Emmanuel Damato, directeur de la DUPS

« Un service en perpétuelle évolution »

Emmanuel Damato est directeur général adjoint en charge de la sécurité. Il revient sur l’origine et les missions d’un service municipal qui n’a cessé d’évoluer depuis sa création en mai 2 000.

M. Damato, comment est né le Top ?
L’office de la tranquillité publique (TOP) a été créé en mai 2000 sous forme de régie autonome avec une quinzaine d’agents. Sa mission principale était la médiation entre les habitants : conflits de voisinage, problèmes avec des jeunes, etc. L’idée consistait à intervenir en amont des conflits. La municipalité de l’époque voulait se doter d’un outil pour résoudre des problématiques qui ne relevaient pas du champ pénal et n’entraient pas dans les compétences de la police municipale.

Comment le service s’est-il organisé ?
Deux missions lui ont été affectées : d’une part répondre aux appels des habitants 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 via un standard ad hoc, et d’autre part intervenir sur le terrain. Les équipes, lors de leurs patrouilles, peuvent tomber par hasard sur un conflit et le résoudre dans la foulée, mais dans les faits il en est rarement ainsi ! Le standard recueillait donc les demandes des habitants et diligentait au besoin les équipes sur le terrain.

Par la suite, les missions du Top ont évolué…
Au fil du temps, le système s’est adapté. Progressivement, le standard a pris en compte des questions dont la résolution ne passait pas par le traitement d’un conflit. Je pense par exemple à un dépôt sauvage ou une difficulté technique : bouche d’égout endommagée, fils électriques qui traînent par terre, feu tricolore qui ne fonctionne pas, panneau de signalisation tombé… Le Top est devenu une porte d’entrée très généraliste pour tous les habitants vers la Ville. Il transmet désormais, au besoin, les demandes des habitants aux services concernés (Ville, Métropole, bailleurs, police, etc.).

Et sur le terrain ?
Les missions ont également évolué. Depuis quelque temps, les agents sont présents pour les entrées et les sorties de certaines écoles. Ils interviennent aussi dans les classes pour parler de citoyenneté ou de sécurité routière. Dans un autre registre, leurs missions de veille sociale ont été renforcées. En l’espace d’une semaine, les agents sillonnent l’intégralité du territoire vénissian. Ils ont ainsi l’occasion de croiser des personnes en difficulté pour les signaler aux services sociaux : des gens qui dorment dans les voitures ou sur des bancs publics, des enfants livrés à eux-mêmes…

Quid des conflits de voisinage ?
Il devient de plus en plus difficile de les résoudre par la médiation. Il y a quinze ans, on pouvait envoyer trois agents pour aider les parties à s’entendre, mais aujourd’hui ce n’est plus le cas. On atteint parfois des paroxysmes d’animosité, aucune des deux parties n’acceptant de faire un pas vers l’autre, certains individus allant parfois jusqu’à prendre à partie les agents du Top. De plus, ces conflits ne relèvent pas toujours du champ pénal. Lorsque c’est le cas, ils donnent souvent lieu à de petites amendes. Et encore, à la condition que la police arrive à faire des constatations ! Nous disposons finalement de peu de solutions, si ce n’est de renvoyer les gens vers des associations spécialisées (ALTM, AMELY). « Conflit de voisinage », ça n’existe pas dans le Code pénal.

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