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Portraits

L’homme du verre

Né en 1952 au Maroc, Lazare Abouchaiba s’apprête à transmettre les rênes de son entreprise de vitrerie-miroiterie à son fils, Adil. Il se pose en passionné du travail du verre et en défenseur du savoir-faire artisanal.

Né en 1952 au Maroc, il s’apprête à transmettre les rênes de son entreprise de vitrerie-miroiterie à son fils, Adil. Installé à Vénissieux depuis les années 1980, il se pose en passionné du travail du verre et en défenseur du savoir-faire artisanal.

« Il faut être un peu fou pour créer une entreprise. C’était vrai à l’époque, et ça l’est encore plus aujourd’hui. » Né en 1952 à Casablanca, au Maroc, Lazare Abouchaiba est vitrier-miroitier à Vénissieux. S’il approche de la fin de sa carrière professionnelle, il assure ne pas être nostalgique au moment de passer le flambeau à son fils, Adil.

« J’ai fait de longues journées pour développer mon entreprise, A.B MIVIA (‘MIVIA’signifiant MIroiterie, VItrerie, Abouchaiba, ndlr). J’ai démarré avec presque rien. Je suis fier du chemin parcouru. Aujourd’hui, je me glisse doucement vers une autre réalité, moins active mais laissant plus de place aux petits plaisirs de la vie. »

Lazare Abouchaiba aura incontestablement réussi sa carrière de vitrier-miroitier, un métier appris au Maroc, dans sa ville natale, dès 1968. Et qui l’emmènera en France cinq ans plus tard, d’abord dans le Loiret, à Montargis. « Le travail du verre, c’est très technique, assure celui qui détient la « qualité artisan » depuis 1990, le titre de Maître artisan depuis 1999. Il existe beaucoup de types de verre, de qualité, de format… Mais c’est un métier que j’aime et, il faut le dire, pouvoir faire au quotidien ce que l’on aime, c’est un privilège. C’est pourquoi j’ai régulièrement eu des apprentis : je voulais transmettre autant que possible cette passion. »

Une rencontre avec Marcel Houël

Son installation à Vénissieux relève, avant tout… du hasard. « Le hasard de la vie, précise-t-il. J’y suis arrivé au début des années 1980 avec mon savoir-faire, mon dossier de chômage, mes envies d’entreprendre… La Mission locale m’a accompagné, j’ai pu créer ma structure assez vite. Les élus m’ont aidé, également. Je me souviens avoir rencontré Marcel Houël (maire de Vénissieux de 1962 à 1985, ndlr). Je lui explique mon projet, il m’écoute attentivement et me dit ‘Tu connais bien ton métier ?’, je lui réponds que oui, bien sûr. Et là il prend ma carte, avec mes coordonnées. Le lendemain, on m’appelle pour me proposer du travail. Il y a une vraie générosité dans la ville, dans son identité, dans son ADN, même. Vénissieux, pour moi, c’est ça : si tu es motivé, compétent, sérieux, alors on te fait confiance et on te donne ta chance. »

Et des récompenses, Lazare Abouchaiba en a obtenues : plusieurs médailles de la reconnaissance artisanale de la Chambre des métiers et de l’artisanat, des prix remis par les bailleurs qui font partie de ses clients, d’excellentes notes aux évaluations fournisseurs… Toutes ces distinctions sont d’ailleurs affichées dans le petit bureau qu’il a aménagé dans son atelier. « Cela fait toujours plaisir de recevoir une médaille ou une récompense. Mais ça ne fait pas tout. En tout cas, j’ai toujours essayé de combiner méthodes traditionnelles et modernes pour satisfaire mes clients. Un bon professionnel, au-delà des récompenses, c’est ça. Quelqu’un qui s’adapte, au jour le jour, en fonction des besoins de ceux qui font appel à ses services. C’est encore plus vrai pour ceux qui, comme moi, ont eu un métier manuel : il ne faut pas bâcler, il faut prendre son temps, s’appliquer, réfléchir pour trouver la meilleure approche. Savoir que la meilleure publicité, c’est les clients qui la font, c’est la clé de la réussite. »

« Un boulot du tonnerre »

Alors, au moment de tourner cette page de sa vie, Lazare Abouchaiba ne veut qu’on retient de lui qu’une chose : « que j’ai fait un boulot du tonnerre. » « À la fin, c’est tout ce qui compte. Les difficultés, les épreuves, les défis techniques, les récompenses, ça va, ça vient. Ce qui reste, c’est la qualité du travail effectué. Cela permet de faire vivre une entreprise, et fait la valeur de ce que je transmets petit à petit à mon fils Ail. »

Et cette transition, justement, est-elle difficile à vivre, pour lui qui travaille le verre à Vénissieux depuis plus de trente ans ? « Non, pas le moins du monde, assure Lazare. C’est dans l’ordre des choses, c’est naturel. Je me sens surtout soulagé de pouvoir transmettre mon entreprise, qui m’a nourri et m’a permis d’élever mes enfants, dans de bonnes conditions. C’est la cerise sur le gâteau de ma carrière professionnelle. »

Lazare Abouchait le dit et le répète, il apprécie avoir l’occasion de parler avec les jeunes de son parcours. De ses réussites. De ses difficultés. Mais se montre conscient du fait que, pour citer le président de la République, « c’est dur d’avoir 20 ans en 2020 ». « Cette année a été difficile pour tout le monde, comme chacun le sait, relève-t-il. Il n’est pas aisé d’avoir 20 ans aujourd’hui, mais il faut rester positif. Vénissieux est une ville dynamique. J’y suis installé depuis 1984 et je la connais bien. C’est aussi le cas de mon fils Adil. Nous espérons que l’année 2021 permettra de mettre un terme à cette épidémie, et à tous d’envisager un avenir plus serein. Moi, si je devais donner un conseil aux jeunes en ces temps compliqués, ce serait de toujours garder de bonnes valeurs. Le travail, le sérieux, peuvent vous emmener loin pour peu que vous fassiez les efforts nécessaires. »

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