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À diplôme égal, chômage inégal dans les quartiers

Avec un même niveau de qualification, il y a environ deux fois plus de chômage chez les jeunes issus des quartiers populaires. Cette situation génère un terrible sentiment d’incompréhension et d’humiliation chez les diplômés que nous avons rencontrés.

Avec un même niveau de qualification, il y a environ deux fois plus de chômage chez les jeunes issus des quartiers populaires. Cette situation génère un terrible sentiment d’incompréhension et d’humiliation chez les diplômés que nous avons rencontrés.

Des études récentes le montrent. Quand on est issu de quartiers populaires et/ou de l’immigration, avoir des diplômes n’ouvre pas forcément les portes de l’emploi. Ilies, Zorah, Jalil (prénoms d’emprunt, lire ci-dessous) et bien d’autres de leurs amis en sont la preuve. Tous sont vénissians, d’origine étrangère « bien que nés à Lyon » aiment-ils à rappeler. Zorah et Ilies ont un master 2, Jalil un diplôme de Sciences Po. Deux ou trois ans après l’avoir décroché, Zorah et Jalil n’ont encore pas trouvé de travail en lien avec leur diplôme. Ilies vient, enfin, de trouver un poste dans un bureau d’études après avoir géré pendant plus de deux ans des stocks dans une grande surface. Zorah est vendeuse dans une boutique de vêtements (lire plus loin leurs témoignages), tandis que Jalil prépare des commandes dans un drive. « Des boulots alimentaires », se désolent-ils.

« Nous sommes face à une vraie discrimination, s’indigne Jalil. À diplôme égal, mes amis qui vivent en centre-ville ont décroché des CDD, puis des CDI. Moi rien, enfin si au drive pour préparer des commandes. Et je dois me rendre à l’évidence. Le fait d’habiter Vénissieux et avoir un nom d’origine maghrébine ne m’aide pas. J’en suis certain. C’est humiliant. » Jalil s’interroge : « Parfois je me demande si c’est de ma faute. Je n’ai peut-être pas tous les codes. Certains employeurs ne veulent pas prendre un risque en nous embauchant. Un jeune de quartier populaire est perçu avec réticence alors que nous sortons des mêmes facs. On se sent tout simplement rejeté, discriminé. »

Une véritable discrimination

Certes, tout le monde en convient. Trouver un travail actuellement n’est pas chose facile pour l’ensemble des jeunes, mais les chiffres sont là. Selon un rapport publié en 2016 par l’Observatoire national de la politique de la ville, un diplômé bac + 5 de plus de 30 ans a 22 % de chances de moins d’occuper un emploi de cadre lorsqu’il est issu des quartiers prioritaires. Et pour les titulaires d’un bac + 2, le taux de chômage est de 18,8 % contre 6,5 % pour ceux qui résident hors des zones urbaines sensibles (ZUS). Une enquête de l’Institut national d’études démographiques (INED) révèle également un écart de taux de chômage pour les enfants d’immigrés non européens de 4 à 5 points par rapport aux jeunes nés en France métropolitaine de parents français.

Discrimination territoriale ou ethnique, manque de réseau, problème d’orientation… Les pistes d’interprétation sont vastes. Pour nos confrères du journal Le Monde, qui consacrait récemment un long article au sujet, « trop souvent les entreprises cultivent l’entre-soi et privilégient des profils de diplômés de grandes écoles de commerce ou d’universités de renom, c’est-à-dire d’établissements auxquels la plupart des jeunes issus des quartiers populaires ont difficilement accès ». Jalil confirme : « Avec ma mention Bien au bac S j’aurai pu faire une prépa, j’ai préféré la fac. C’est aussi une question de coût. Et du manque d’information des parents. Il faut surtout que les regards des chefs d’entreprise évoluent et nous fassent confiance. »

De nombreux dispositifs ont été mis en place ces dernières années pour inciter les entreprises à embaucher les jeunes des quartiers populaires. Mais les résultats sont peu probants. Malgré tout, en avril prochain, des emplois francs vont renaître. Une annonce faite par le président de la République en novembre dernier à Tourcoing. Les entreprises qui embauchent des jeunes issus des quartiers populaires recevront ainsi des primes : 15 000 euros pour un CDI (échelonné sur trois ans) et 5 000 euros pour un CDD (échelonné sur deux ans). Ce dispositif ambitionne de créer 10 000 emplois pour un coût total de 180 millions d’euros pour 2018. Emmanuel Macron a également annoncé la généralisation des testings consistant à envoyer deux CV identiques à une entreprise, en incluant dans l’un des critères potentiellement discriminants (âge, adresse, nom de famille, sexe). Il est question que les résultats de ces tests soient ensuite publiés afin de mettre sur la place publique les entreprises mauvaises élèves.

Ces annonces n’ont pas vraiment convaincu nos jeunes diplômés vénissians. L’un d’eux s’est même montré très critique à l’égard des primes à l’embauche : « Alléger le coût de l’emploi pour l’entreprise quand c’est un jeune comme nous qui en profite, pour moi cela reste de la discrimination, même si elle est qualifiée de positive. »

 

Le film “Vaurien” s’est emparé du sujet

“Je suis content de voir un film qui parle enfin des diplômés bac + 5 qui n’arrivent pas à trouver du boulot. C’est mon cas, je suis resté ainsi deux ans avant d’en dégotter un.” Témoignage entendu après la projection en avant-première, le 27 janvier au cinéma Gérard-Philipe, du film “Vaurien”. Réalisé par le Vénissian Mehdi Senoussi, “Vaurien” a su séduire les spectateurs. Ce braquage d’un Pôle emploi par un jeune qui a perdu tout espoir et qui est pourtant bardé de diplômes s’inscrit malheureusement dans l’air du temps. On pourra le voir sur les écrans en septembre.

 

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