Le 29 janvier, Jean-Christophe Lagrange, professeur de physique au collège Paul-Éluard, prendra le départ de La Bouvet-Guyane, une transatlantique à la rame. À quelques jours de son départ pour Dakar, il se confie.
Ambition sportive. “Mon objectif initial visait les 45 jours sans me soucier du classement. À la réflexion et un an après, j’espère arriver dans le groupe des 5 premiers. Au-delà il y aura de l’amertume. Je suis effectivement le seul “voileux” de la bande depuis le retrait de Didier Torre qui s’est cassé un bras. Mais je reste très humble devant l’immensité du parcours et c’est quand même ma première transat à la rame.”
Retour sur le prologue à Brest. “Ce fut une expérience très intéressante de me confronter à mes camarades. Pour tout vous dire, je n’ai pas vraiment ramé. J’ai d’abord navigué. Le courant favorable vous invitait à vous décaler de la côte mais il y avait un vent traversier. Et nos canots n’aiment pas le vent traversier. J’ai longé la digue et ensuite la plage. Il n’y a qu’en arrivant près du port du Moulin Blanc que j’ai dû forcer sur les avirons pour atteindre la ligne d’arrivée tandis que d’autres se faisaient emporter par le vent de l’autre côté du plan d’eau. J’ai fini 5e à 10” du 4e et 50” du 3e. J’ai regardé les autres ramer et j’ai vu ceux qui avaient appris dans un club d’aviron et d’autres plus en phase avec un rythme transatlantique. J’ai regardé les vidéos. C’est riche d’enseignements.”
Découverte de l’aviron. “J’ai appris la rame il y a un an et demi au Grand-Large à l’Aviron Majolan. Le club compte deux médaillés olympiques parmi ses sociétaires dont un “voileux”. Je n’ai pas chômé. Aussi on a inventé un truc rigolo au collège : le ramethon. Trois ergomètres mis en parallèle avec deux équipes d’élèves qui se relaient de 9 heures à 16 heures pour faire un maximum de kilomètres. Et une équipe d’enseignants. Inutile de vous dire que j’ai beaucoup donné l’an passé.”
Entraînement. “Je me suis surtout appliqué à acquérir le bon geste en ramant 2 à 3 fois par semaine. Je couplais l’exercice avec d’autres activités et du travail au cardiomètre. L’aviron se pratique généralement sur courte distance et un temps bref. Ça monte à 36 coups d’avirons à la minute et un rythme cardio au taquet. Moi, je me suis habitué à 18 coups par minute en maintenant une cardio à 125-130 pulsations/minute. Pour ramer longtemps. Dans l’Atlantique, je prévois de ramer 8 à 10 heures/jour, surtout le matin et la nuit car dès midi il fait chaud et on se déshydrate rapidement. À midi, je m’arrête pour manger puis je pense observer une pause jusque vers 16 heures pour étudier la météo, communiquer, faire une sieste, bouquiner… Ce rythme risque d’évoluer au fil du temps, de mon classement, des zones de navigation. Au début, il y a peu de courant, puis ensuite du vent de travers à gérer. Plus en avant, le vent vient de l’arrière et en approche de la Guyane il y a du courant traversier. Le vrai juge de paix sera surtout mon état physique et ma fraîcheur.”
Ramer en mer. “Cet été, je suis parti trois jours en mer avec un trajet aller-retour au départ de Palavas. J’ai constaté qu’il est difficile d’avancer face au vent. Et que le canot se met rapidement de travers dès que le vent prend de côté. La dérive nécessite un réglage subtil tout autant que le gouvernail pour obtenir le meilleur compromis efficacité/traînée. Je me suis volontairement mis dans la situation d’avoir à ramer longtemps, quatorze heures d’affilée avec une seule pause d’une demi-heure à mi-temps. Histoire de me préparer à ce qui pourrait nous arriver au Cap Orange et près des courants d’Amazone.”
Appréhensions. “Je redoute de ne pas être capable de tenir un bon rythme de rame pour la bonne raison que je manque d’expérience sur la longue distance. Je redoute également la communication. En mini transat, il n’y en a pas sauf en VHF quand on est en vue d’un concurrent. Sur ma “Quenelle” j’aurai plusieurs fois par jour la position des autres, les conditions de mer devant et derrière, la météo, etc. J’ai beau avoir limité l’accès de mon téléphone satellite à un minimum de gens, ça fait beaucoup !”
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