Jeune plasticienne qui vient de débuter sa résidence artistique à Vénissieux, Amélie Berrodier privilégie les rencontres dans son travail. “Une résidence de territoire est toujours un terrain favorable pour produire des pièces qui vont me faire entrer en contact avec les gens”, assure-t-elle. Ainsi, après d’autres résidences du même type — à Monflanquin dans le Lot-et-Garonne, à Toulouse et, à Lyon, à la Factatory, aux Subsistances et aux Halles du faubourg —, Amélie décide de postuler à Vénissieux, où elle est prise.
“Il existe un grand panel d’écoles sur Vénissieux qui pourraient participer à mon projet. J’aimerais couvrir un grand territoire.” Ce projet, inscrit dans la note d’intention de sa candidature, va donc concerner les scolaires, du CP au CM2, et la photo de classe. Mais, avant d’approfondir le sujet, laissons à Amélie le soin de donner quelques précisions sur sa façon de travailler :
“Je fais beaucoup de porte-à-porte. C’est la manière principale de rencontrer un maximum de personnes. Et de me laisser surprendre. J’étudie l’histoire du portrait et son évolution : les moyens techniques qui ont permis de le capter, ses utilisations, ses fonctions sociologiques… Je mets en place des dispositifs qui vont interroger une partie spécifique de toutes ces dimensions.”
Ainsi Amélie provoque-t-elle le hasard. “J’arrive avec un protocole et, au final, je vois une personne s’exprimer. Comment elle échappe à ce protocole ou comment elle entre dedans.”
Dans les mises en scène qu’elle propose, elle déclenche parfois le mode vidéo de son appareil plutôt que la photo. Et regarde comment l’on peut passer du lâcher prise au contrôle de l’image renvoyée, comment la gestuelle, l’expression, les patiences ou impatiences disent beaucoup de nous.
“Grâce à Xavier Jullien, le directeur de l’espace arts plastiques Madeleine-Lambert, j’ai rencontré Lola Bringuier à la Maison de quartier Darnaise, qui m’a mise en relation avec des enseignants et des directeurs d’école. J’ai aussi contacté le PRE (Programme de réussite éducative).” Elle découpe son projet sur les photos de classe en “trois grosses parties et une petite quatrième”.
Les photos des enfants, de leurs parents et grands-parents
“Il s’agit d’abord de rencontrer les enfants, leur montrer mon travail et récupérer les photos de classe de leur foyer : les leurs, celles de leurs parents et grands-parents. De mon côté, je contacterai les écoles qui ne participent pas pour voir leurs archives.”
Amélie veut étudier au plus près cette banque d’images de la grande époque du “Ne bougeons plus”, les analyser, voir leur évolution : “le noir et blanc, la couleur, les modes vestimentaires, les différents types de pose, les mises en scène…”
Dans un troisième temps, la jeune femme proposera aux enfants une mise en scène : “Le tout est qu’ils s’amusent. Ils pourront calquer ce qui a été fait, inventer d’autres façons de procéder, faire un mix des deux. J’ai même scanné de vieilles photos de ma sœur et moi. Il existe plein de possibilités de mises en scène : figées ou pas, avec ou sans accessoires, en groupe ou individuelles.”
Amélie veut également amener les enfants à réfléchir sur la manière de présenter les images ainsi obtenues dans un contexte d’exposition. Ce qui serait la quatrième partie du travail. Elle voudrait aussi le montrer à l’espace d’arts plastiques — ne serait-ce que pour mélanger toutes les écoles ayant participé —, ce que confirme Xavier Jullien : “Son expo est bien inscrite dans la programmation de l’EAP l’an prochain : elle s’étendra de mai à juillet, et on y retrouvera des travaux réalisés au cours de la résidence.”
Son parcours
Amélie Berrodier raconte que son envie de faire de la photographie remonte à ses plus jeunes années. “J’ai étudié les arts appliqués à Lyon puis j’ai été reçue aux Beaux-Arts de Dijon, où j’ai suivi des cours de photo. Je voulais entrer à l’école de photo d’Arles. Aux Beaux-Arts, on touche à tous les médiums, c’est pluridisciplinaire. Je me suis orientée vers la vidéo, qui a représenté 80 % de ma production. J’ai aussi travaillé sur des installations. La vidéo est d’ailleurs une passerelle entre la photo et l’installation. Ces études m’ont aidée à esquisser des questionnements, à expérimenter des choses avec une caméra pour savoir si je faisais du documentaire ou de la fiction ou ni l’un ni l’autre.”
Elle explique encore, sur son site (amelieberrodier.com) : “Ces imbrications entre les différentes entités — filmé, caméra et filmeur — se font et se défont dans chacun de mes projets.”
Amélie Berrodier recherche des photos de classe, toutes époques confondues. Vous pouvez la contacter par mail pour connaître la procédure : mail@amelieberrodier.com
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