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40 ans d’existence et 30 de festival : souvenirs puisés dans la boîte de Pandora

L’Espace Pandora célèbre ses 40 années d’existence. Et propose du 3 au 14 novembre la 30e édition de son festival poétique Parole ambulante.

Une partie de l’équipe : Jamel Morghadi, Dimitri Porcu, Thierry Renard et Christophe La Posta (Photo Emmanuel Foudrot)

Dans son bureau de l’Espace Pandora, situé place de la Paix, Thierry Renard soupire : « Quarante ans, déjà ! » Quarante années qu’il est à la tête de l’association qu’il a créée, passant du rôle de président à celui de directeur. Et quand on lui demande la date exacte de la naissance, il fait appel à son ami et bras droit Jamel Morghadi, mémoire vivante de la structure : « Le 30 décembre 1985 est la date de l’enregistrement en préfecture. »

Thierry Renard reprend : « On a réellement commencé avant, avec Sylviane Crouzet, Patrick Vighetti et moi, avec la revue de poésie Aube. Elle était imprimée au centre Boris-Vian. Olivier Fischer nous a rejoints avant la création de l’association pour les maquettes des magazines et les dessins des couvertures. »

Ancrée en lui depuis toujours — ne se proclamait-il pas « le nouvel Arthur Rimbaud » ou « le poète des Minguettes » ? —, la poésie conduit Thierry à la rencontre de Charles Juliet, grand auteur vivant à Lyon et disparu l’an dernier. « C’était en 1978 et il nous a mis en contact avec d’autres poètes vivants tels qu’Andrée Chedid ou André Velter. On ne connaissait rien à rien et, pour notre revue, on leur demandait des textes. Et ils nous les donnaient ! »

Thierry soupire car les premiers poètes avec qui il s’est lié d’amitié (Charles Juliet, Christian Bobin, Andrée Chedid…) sont aujourd’hui décédés. « Velter a été l’un des premiers, il est aujourd’hui âgé de 80 ans et il a accepté de participer à notre festival Parole ambulante qui, quant à lui, célèbre ses trente ans. »

Un film avec Ava Gardner

Continuons les souvenirs… « Benoît Guillemont, qui était alors à la Drac, la Direction régionale des affaires culturelles, nous a persuadés de créer une association et de nous professionnaliser. Olivier Fischer, qui était l’élève de René Jaros, a proposé à l’école d’arts appliqués de Lyon de prendre pour mémoire de fin d’études la maquette de la revue Aube. Cela nous a mis le pied à l’étrier. »

Charles Juliet (prix Goncourt de poésie en 2013), sur la photo à gauche, a inspiré l’aventure de l’Espace Pandora et de ses multiples éditions (Photo JCL)

Thierry va alors voir le maire de Vénissieux, à l’époque Marcel Houël, pour lui demander un local. Mais l’équipe se retrouve finalement rue des Marronniers.

« Pour créer l’association, nous avons attendu que Sylviane soit majeure. Nous voulions la nommer Laboratory ou plutôt The Lab of the Last Poets car notre groupe musical préféré était les Last Poets. Mais le nom sonnait trop comme un labo d’analyse. »

Grâce au poète lyonnais Bernard Simeone, Thierry rencontre René Char à L’Isle-sur-la-Sorgue. « J’avais une vingtaine d’années. La Ville de Vénissieux nous avait finalement trouvé un local, l’ancien atelier de René Jaros, rue Gaspard-Picard. Nous voulions le baptiser Maison de la poésie René-Char. Mais Char meurt en 1988 et sa veuve refuse. »

Benoît Guillemont intervient. « Ne vous embêtez pas, dit-il en substance, avec un nom qui sera dur à porter. Il faut trouver autre chose. »

La suite est racontée par Thierry Renard : « Un soir, il nous passe le film d’Albert Lewin, Pandora, avec Ava Gardner et James Mason. Et nous décidons de garder le titre du film. Tout le monde pourra y trouver sa définition. Et ainsi, à la différence des maisons de la poésie, nous avons pu publier, outre des poèmes, des romans, des nouvelles et des essais. »

L’Espace Pandora est né. Depuis, il mène de front deux festivals (Parole ambulante et le Magnifique printemps), une aventure éditoriale conséquente et de nombreuses activités.

En plein travail : Thierry Renard, Myriam Chkoundali, Jamel Morghadi, Christophe La Posta et Morgane Attento

« Nous avons toujours marché sur deux jambes, reprend Thierry : les projets éditoriaux et l’action culturelle. » Ainsi, Pandora propose de nombreux ateliers d’écriture avec des écrivains que l’association — et la Ville — accueillent en résidence littéraire.

« 1999 marque un tournant, ajoute Thierry Renard. Notre structure pilote au niveau national le jeu des 10 mots de la langue française et nous sommes missionnés également pour la Semaine de la langue française. En 2002, Patrice Béghain, adjoint à la Culture à la Ville de Lyon, nous confie l’organisation du Printemps des poètes à Lyon. Jusqu’en 2016, le Printemps et la Semaine de la langue française sont séparés. En 2017, nous réussissons à convaincre tous les partenaires de créer un seul événement : le Magnifique Printemps. »

Il se félicite également que Patrice Béghain ait fait travailler ensemble Pandora et l’Institut Lumière, le musée des Beaux-Arts et l’Opéra de Lyon. « De tels partenariats entre les institutions et les associations culturelles sont rares. »

Notons également que l’Espace Pandora est partie prenante, avec la bibliothèque municipale de Lyon, des deux prix de poésie lyonnais : Roger-Kowalski et René-Leynaud.

Des centaines de livres : l’aventure éditoriale

Après la revue Aube, l’Espace Pandora se lance dans une nouvelle aventure avec les éditions Paroles d’Aube, en octobre 1991. « La maison d’édition s’est installée rue du Château, à Vénissieux, indique Thierry Renard. Ce qui nous a fait plaisir car, à Paris, les surréalistes étaient eux aussi rue du Château. Nous avons également été invités par la mairie de Grigny où nous avons créé le salon des éditeurs indépendants et le festival De l’écrit à l’écran. »

Il estime que les années 1994-98 figurent parmi les grands moments de Paroles d’Aube. « Certains de nos livres ont dépassé les 10 000 exemplaires. Nous étions entre 15 et 20 000 avec Hubert Reeves, Charles Juliet et Andrée Chedid. Christian Bobin a été au-delà des 40 000 et notre record est André Comte-Sponville, avec plus de 100 000 exemplaires vendus. »

Sur le bureau de Thierry Renard, la photo d’Albert Camus, un de ses auteurs préférés (Photo Emmanuel Foudrot)

Invité par Bernard Pivot pour son émission Bouillon de culture, le philosophe propose à Thierry Renard de l’accompagner sur le plateau télévisé. Étonné par le succès du livre, Bernard Pivot demande alors si Paroles d’Aube va désormais s’installer à Paris. Et Thierry de répondre : « Pas du tout, je préfère rester à Vénissieux ! »

Après l’arrêt de Paroles d’Aube en 1999 — 147 titres ont été publiés —, Pandora crée immédiatement La Passe du vent. Outre la poésie, cette nouvelle maison d’édition publie également des ouvrages collectifs sur Boris Vian, Pier Paolo Pasolini ou André Breton, des recueils de nouvelles mais aussi plusieurs beaux livres sur le Palais idéal du facteur Cheval ou l’abbaye d’Hautecombe.

Puis, après la naissance de la revue RumeurS en 1996 — après quelque retard, le nouveau numéro vient d’ailleurs d’être publié —, la maison d’édition fusionne, en janvier 2021, avec sa consœur La Rumeur libre d’Andrea Iacovella.

« Jusqu’à présent, déclarait ce dernier, à part 2020 qui fut une année particulière, La Rumeur libre sortait en moyenne 25 titres par an et La Passe du vent entre 15 et 20. La nouvelle maison d’édition pourra donc publier une quarantaine d’ouvrages par an. »

La livraison de juin 2025, avec les collections Noces et 1 poète 1 livre, comporte plusieurs titres. La plupart sont des recueils de poèmes, tels Histoire d’une marche en plein ciel d’Éloïse Sekula, La Fille du condamné à mort de Carine Fernandez, Feuilles d’ombre de Sylvain Chomienne et Aubrac, ténèbres pieuses de Vincent Calvet. Avec Hauts lieux d’André Breton, Bruno Geneste évoque les sites chers au maître du surréalisme : Paris, Nantes, Saint-Cirq-Lapopie, New York, Mexico, la Bretagne, la Martinique…

Et, en septembre 2025, deux nouveaux titres enrichissent encore le catalogue de la collection Noces, à La Rumeur libre : Mother de Gaëlle Joly Giacometti — un texte sur le deuil étonnant et joliment écrit, où le poignant rejoint le sarcastique — et Exister de vivre de Stéphane Juranics où, ainsi que le rappelle Emmanuel Merle dans sa préface, on trouve « cette nécessaire dualité de toute poésie véritable : le bonheur d’être au monde et la conscience aiguë de la déchirure de vivre ».

Les dernières parutions à La Rumeur libre (Photo JCL)

 

Repères

Des écrivains en résidence

Tous les ans depuis 2009, l’Espace Pandora accueille un auteur en résidence littéraire, avec le soutien de la Ville de Vénissieux. Se sont ainsi succédé Moussa Konaté, Fabienne Swiatly, Joël Bastard, Mouloud Akkouche, Laure Morali, Pierre Soletti, Denis Pourawa, Samira Negrouche, Laura Tirandaz, Rémi Chechetto, Joël Vernet, Arnaud Savoye, Terez Bardaine, Mathieu  Tulissi -Gabard, Hélène Lépine et Eddy L. Harris.

Au cours de sa résidence, l’écrivain rencontre les habitants, anime des ateliers d’écriture et va dans les classes.

« La prochaine résidence, indique Thierry Renard, a été proposée à l’autrice italienne Zingonia Zingone, que nous avons reçue lors du Magnifique printemps cette année. Elle arrivera fin janvier. »

Les présidents

« Au début, énumère Thierry Renard, j’ai dû être président de l’association avec Sylviane Crouzet. Puis, se sont succédé Jean-Pierre Spilmont, Philippe Videlier, Geneviève Metge, sous la présidence de laquelle l’Espace Pandora s’est beaucoup développé, avec les 10 mots et la première convention signée), puis Emmanuel Merle depuis 2012. »

L’Espace Pandora, c’est aussi

62 numéros de la revue Aube, de 1978 à 1998, « sans compter les numéros spéciaux »
147 livres publiés aux éditions Paroles d’Aube entre 1991 et 1999
283 livres publiés à La Passe du vent entre 1999 et 2020
– plus de 80 titres, depuis le 1er janvier 2021, pour La Rumeur libre, toutes collections confondues : Noces, 1 poète 1 livre, Faire Cité, Politiques culturelles et territoires, Pépites.
13 numéros de la revue RumeurS
– au moins deux passages TV : le jeune Thierry Renard, âgé d’une quinzaine d’années, affirme à FR3 qu’il est « le poète des Minguettes » et, plus tard, en avril 1995, il participe à l’émission Bouillon de culture de Bernard Pivot, aux côtés de Rony Brauman et André Comte-Sponville, l’invité principal. Sans parler du film réalisé à l’occasion des 30 ans de Pandora par Charles Salignat.

 

Parole ambulante : À la belle étoile

Si l’Espace Pandora fête ses 40 ans, le festival poétique créé par l’équipe a, quant à lui, déjà 30 ans. « Nous avions il y a bien longtemps un cycle de rencontres dans des lieux différents de la ville, quasiment essentiellement vénissians. »

Directeur de l’Espace Pandora, qui organise Parole ambulante, Thierry Renard poursuit : « Nous invitions des poètes, des conférenciers, des philosophes comme André Comte-Sponville, à raison d’une rencontre par mois qui se déroulait dans les bibliothèques, au cinéma ou au théâtre. En 1995, nous avons décidé de transformer le cycle en festival. »

L’idée étant toujours de changer de lieux, les différents rendez-vous ont eu lieu à Vénissieux, Lyon puis dans toute la région, comme c’est le cas aujourd’hui. « Dans nos premières éditions, nous avons eu André Velter, Charles Juliet, Yvon Le Men, Andrée Chedid… Ce qui fait quelque 250 auteurs invités, sans parler des musiciens et autres artistes. »

L’équipe de Pandora gère à présent deux grands festivals : le Magnifique printemps et Parole ambulante et Thierry Renard reconnaît que « le second est plus petit en nombre de soirées, mais avec une totale liberté dans les thèmes ».

La 30e édition de Parole ambulante se tiendra donc du 3 au 14 novembre. Avec un beau titre, Rallumons les étoiles, faisant écho à Jaurès qui désirait « rallumer les soleils ». Deux rendez-vous auront lieu à Vénissieux, les autres dans la métropole lyonnaise (théâtre des Marronniers, librairie L’Œil cacodylate, Maison des passages, Alliance française, Théâtre sous le caillou, Ferme du Vinatier) mais aussi à Villefranche (médiathèque Mendès-France) et à Saint-Maurice-l’Exil (médiathèque Écume). Et Parole ambulante s’invite encore, à l’issue du festival, aux 80 ans de la MJC de Chambéry les 15 et 24 novembre.

André Velter, parrain de la trentième édition de Parole ambulante (Photo Sophie Nauleau)

Le poète André Velter sera le parrain de cette édition : il participera, le 3 novembre au théâtre des Marronniers, à un apéro-poétique à 12h15 et un récital avec le musicien Laurent Decavele à 19h30. Le lendemain, à 18h30 à L’Œil cacodylate, il présentera avec Sophie Nauleau la revue Kali Yuga.

Parmi les autres moments forts du festival, le 5 novembre, Thierry Renard et le musicien Dimitri Porcu animeront une formation, De la médiation à l’émancipation, avant de rejoindre le soir Paola Pigani (à Saint-Maurice-l’Exil). Un spectacle sera donné au théâtre des Marronniers sur « deux poètes en lutte », Pier Paolo Pasolini et Marc Porcu, du 6 au 8 novembre. Puis les soirées poétiques se succéderont : le 8 novembre à l’Alliance française (avec Mouloud Akkouche, qui fut en résidence littéraire à Vénissieux, Emmanuel Merle, l’actuel président de l’Espace Pandora, Bruno Geneste, Stéphane Juranics, Martin Laquet, Catherine Pont-Humbert, Yves Pignard, Dimitri Porcu, Stéphane Lambert, enseignant à l’école de musique de Vénissieux, et les Vénissians Christophe La Posta, Thierry Renard et Sonia Viel), le 10 novembre au théâtre des Marronniers (avec Geneviève Metge, Paola Pigani, Catherine Pont-Humbert et Damien Gouy), le 12 novembre à la Ferme du Vinatier (avec Claude Gobet, Christine Durif-Bruckert et Thierry Renard) et le 13 novembre au Théâtre sous le caillou (avec Bruno Doucey).

À Vénissieux

Le 9 novembre à partir de 9h45, l’Espace Pandora propose de redécouvrir à pied la ville de Vénissieux, en compagnie de Benoît Guillemont. Aujourd’hui retraité, l’ancien conseiller de la DRAC (Direction régionale des affaires culturelles) accompagne des balades pédestres. Il l’a fait à Vénissieux lors des Journées européennes du Patrimoine et à laissé un excellent souvenir à ceux qui ont participé à l’équipée, malgré la pluie.

Il donnera donc rendez-vous le 9 novembre devant la gare de Vénissieux et nous incitera, jusqu’à midi, à découvrir quelques curiosités, le tout accompagné de lectures poétiques.

Le 14 novembre à 18 heures, la soirée de clôture du festival se tiendra à la médiathèque Lucie-Aubrac. Au cours de cette lecture-rencontre, on pourra célébrer tout à la fois les quarante ans de Pandora et les trente ans de Parole ambulante, en compagnie de Bruno Doucey, Samantha Barendson, Alain Fisette, Dimitri Porcu, Thierry Renard, Christophe La Posta et Morgane Attento.

L’Espace Pandora (Photo Emmanuel Foudrot)

Rallumons les étoiles : du 3 au 14 novembre.
Tout le programme du festival.

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