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Burn-out : des enseignants de Vénissieux témoignent

Les souffrances et l’épuisement de nombreux enseignants ont été largement mis en lumière par le suicide d’un  professeur dans un lycée de Béziers, Lise Bonnafous, 44 ans. Une étude, qui vient d’être publiée dans le journal Le Monde, révèle que 17% des professeurs sont victimes d’épuisement, contre 11% dans les autres professions. Les jeunes en dessous de 30 ans sont les plus exposés au burn-out, un phénomène d’épuisement physique et mental  et émotionnel. Cette enquête a été réalisée par Georges Fotinos et José-Mario Horenstein, médecin psychiatre à la mutuelle MGEN, auprès de 2 100 salariés (surtout des enseignants) de 400 lycées et collèges, en collaboration avec la MGEN, la banque Casden et l’École supérieure de l’éducation nationale (Esen). C’est pourquoi je suis allée demander leur avis à des enseignants de Vénissieux, parmi lesquels Marie et Thomas, que j’avais rencontrés il y a tout juste un an alors qu’ils débutaient leurs carrières.

Voici deux semaines, les professeurs du lycée professionnel Marc-Seguin faisaient valoir leur droit de retrait à la suite d’un incident grave dans une classe. “Depuis, un nouvel incident s’est déroulé dans l’établissement” , précise Olivier Champoussin, prof au LP et secrétaire départemental du syndicat CGT Educ’Action. “Ce qui nous manque aujourd’hui c’est la reconnaissance de notre ministère. On supprime des postes de surveillant, nos classes sont surchargées, les élèves n’ont pas forcément choisi cette orientation. Sans oublier les réformes qui se succèdent. Ce n’est pas toujours facile mais on tient bon .” 

Un peu plus loin, dans un collège des Minguettes, une enseignante de mathématiques présente dans l’établissement depuis plusieurs années reconnaît que la situation ne va pas en s’arrangeant: “Ce n’est pas forcément de la faute des gamins, mais c’est surtout qu’on manque de moyens. Quand j’ai débuté, il y a une quinzaine d’années, on avait plus d’heures de dédoublement par exemple. Pour s’en sortir, il faut que les équipes d’enseignants et de direction soient fortes. Ce qui est le cas ici. Je trouve aussi que le comportement des gamins a changé. Certains n’ont plus de limite face aux adultes.”  Malgré tout, elle  comprend l’attitude et le ras-le-bol des plus jeunes, et n’a jamais songé à quitter son  collège des Minguettes..
J’ai également recontacté Marie et Thomas, enseignants stagiaires  l’an dernier. Ayant  réussi leur concours en juin 2010, ils effectuaient leur première rentrée à Vénissieux, en Zone d’éducation prioritaire. Marie est professeur des écoles en CM2 ; Thomas professeur d’histoire en 6e.  Tous deux ont moins de 30 ans,  la tranche d’âge qui serait la plus touchée par ce burn-out. “Je ne le subis pas encore, sourit Marie, mais j’ai de la chance de travailler au sein d’une équipe formidable. L’an dernier , c’est vrai, j’ai cru que je n’allais pas m’en sortir. En CM2, je dois faire face au mal-être de certains élèves et de leurs parents. Pour l’instant, je me sens bien et je me suis attachée aux enfants du quartier. Certains, entrés en 6e,  reviennenet me voir.”
Pour Thomas, c’est plus difficile. Cette année encore, dans sa classe de sixième, les niveaux sont extrêmement variés. “Certains travaillent bien, mais d’autres sont déjà en échec scolaire. Certains me semblent relever de l’enseignement spécialisé, sur le plan intellectuel ou comportemental. Comment faire pour aider ceux qui sont le plus en difficultés ? C’est pour ça qu’il est important que l’équipe soit soudée. Mais la violence est latente,  injures, bagarres à la sortie entre élèves. On a l’impression qu’ils sont sous tension. Et qu’il en faudrait peu pour que les situations dégénèrent. Mon amie est enseignante : elle est restée  un mois en arrêt maladie  l’année dernière, à cause de son travail. Elle ne pouvait plus entrer dans sa classe de seconde. Et pourtant, elle ne travaille pas en ZEP. Certains élèves chahutaient. Quand on choisit cette profession, ce n’est pas pour s’en prendre plein la figure. A 27 ans, elle hésite à poursuivre sa carrière.”  Ce qui est décourageant aussi, relève Thomas, c’est le manque de travail des élèves. “Certains arrivent le matin au collège sans avoir jamais travaillé la veille. Et quand on met des mots sur les carnets de liaison, ils reviennent rarement signés. Il faut s’y faire !”
Selon Françoise Lantheaume, sociologue à l’université Lyon-2, “il y a des souffrances extra-ordinaires, comme celle de Lise Bonnafous, mais elles sont rares. Et il y a des souffrances ordinaires : les enseignants français expriment massivement des sentiments d’usure, d’impuissance et d’abandon.”
Les syndicats avancent le nombre de 39 suicides par an pour 100.000 enseignants. Un chiffre contesté par le ministère de l’Éducation nationale : selon une enquête de la direction générale des ressources humaines, il aurait été recensé “52 cas de suicides de septembre 2008 à septembre 2009 sur une population de 857.000 enseignants, soit un peu plus de 6 suicides pour 100.000 enseignants”. Ce qui, de toute façon, est déjà beaucoup trop.

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