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Mobilisation contre le frelon asiatique

Dans le département, les organismes de la défense des abeilles coordonnent pour la première fois leurs actions afin de lutter plus efficacement contre la prolifération du frelon à pattes jaunes.

Les apiculteurs vivent sous la menace du frelon à pattes jaunes, introduit en France il y a une vingtaine d’années

En 2025, la section apicole du GDS 69, le Groupement de défense sanitaire apicole du Rhône (GDSA 69) et le Groupement d’action sanitaire apicole du Rhône (Gasar) fourbissent leurs armes contre le frelon asiatique. Pour la première fois, ces trois acteurs clés de la protection des abeilles dans le département agissent de concert pour limiter la prolifération de ce prédateur tant redouté. Cette collaboration, qui découle du plan national de lutte, s’articule autour de trois axes : le piégeage sélectif de printemps, la destruction des nids, ainsi que la protection des ruchers.

« Avant, nos trois structures travaillaient chacune dans leur coin, explique Christophe Chaize, apiculteur amateur et président du GDSA 69. Cette fois-ci, on met un gros coup pour identifier le plus de nids possible. Un référent est en place dans chaque commune. Généralement un apiculteur, un agriculteur ou un élu local. Les enjeux, c’est de recruter des piégeurs, de distribuer des pièges sélectifs et de débloquer des fonds auprès des communes ou communautés de communes. »

« Seuls 30 % des nids sont signalés »

En ce début de mois de juin, la saison de piégeage touche à sa fin. Commencée en mars, la campagne consistait à capturer les fondatrices à l’aide de pièges sélectifs. Tout juste sorties d’hibernation, ces dernières cherchent des ressources et à fonder de nouveaux nids. Ces nids primaires, de la taille proche de celle d’un pamplemousse, se forment généralement à hauteur d’homme. Une fois plein, la colonie le quitte pour former un nid plus gros, de près d’un mètre de diamètre, qui accueillera environ 3 000 individus en plein été.

« On invite les habitants à vérifier les appentis, abris de jardin ou cabanes pour enfants, poursuit Christophe Chaize. Ces nids primaires sont faciles à enlever. Il faut le faire de nuit, lorsque les frelons sont dedans. Il suffit de placer un bocal en dessous et de le décrocher pour le faire tomber dedans. On referme le couvercle et on le met dans le congélateur. Autrement, chacun peut déclarer la présence sur la plateforme dédiée. Un désinsectiseur, financé par cette plateforme, interviendra… tant qu’il y a des sous dans les caisses. »

Si la capture de nids primaires est à la portée de tous, la destruction d’un nid secondaire est l’affaire de professionnels. L’opération est dangereuse. « On les retrouve dans les arbres, dans le sol, dans les haies, et même dans les boîtes aux lettres, avertit Christophe Chaize. Attention en passant la tondeuse ou le taille-haie ! Dans le Rhône, on en trouve essentiellement le long du fleuve. Une météo douce est propice à leur développement. Entre 2 000 et 3 000 nids ont été déclarés en 2024. On estime que seuls 30 % sont signalés. On évaluera à la rentrée l’efficacité de notre coordination. Mais on a vraiment le sentiment de courir un marathon plutôt qu’un sprint. Le chemin est long. »

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Signaler la présence d’un nid : frelonsasiatiques.fr

Un dispositif juridique pour freiner le frelon à pattes jaunes

 

En France, le frelon à pattes jaunes est classé dans la liste des dangers sanitaires de 2e catégorie pour l’abeille domestique (Apis mellifera) depuis un arrêté du 26 décembre 2012. Il est inscrit comme « espèce exotique envahissante » depuis un autre arrêté en date du 22 janvier 2013. Sa notoriété dépasse les frontières hexagonales : l’Union européenne l’a classé comme espèce exotique envahissante préoccupante le 13 juillet 2016.

21 ans après son introduction accidentelle en France, dans le Lot-et-Garonne, lors d’un arrivage de poteries chinoises, Vespa velutina nigrithorax fait l’objet d’une loi, promulguée le 14 mars. Cette loi « visant à endiguer la prolifération du frelon asiatique et à préserver la filière apicole ». « Ce frelon est responsable de 20 % de la mortalité des abeilles domestiques, mentionnaient le sénateur Michel Masset et ses collègues du groupe Rassemblement démocratique et social européen dans la proposition de loi. Les pertes directes qu’ils causent sont de 12 millions d’euros par an pour la filière apicole. » Cette loi, de portée générale, a pour but de « remédier aux lacunes de l’action publique » en instituant un plan de lutte national, déclinable en plans départementaux. Les contours des financements de l’État, des collectivités territoriales et des acteurs socio-économiques et sanitaires restent encore flous. Mais il prévoit des indemnisations aux apiculteurs ayant subi des dommages.

Questions à Quentin Brunelle (naturaliste, co-fondateur et directeur Des Espèces Parmi’Lyon)

« Le frelon asiatique est un peu le bouc émissaire des apiculteurs »

Le frelon asiatique représente-t-il un danger pour l’homme ?

« Oui, au même titre que l’abeille domestique, qui peut causer des décès en raison de chocs anaphylactiques que peuvent subir les personnes allergiques au venin. Le danger reste relatif : depuis son apparition en France en 2004, moins de dix décès ont été recensés. »

Et pour les abeilles ?

« Le frelon asiatique est un peu le bouc émissaire des apiculteurs. Il faut préciser qu’en Europe, le marché du miel représente entre un et deux milliards d’euros. Concrètement, le frelon asiatique cible les abeilles des ruches et fait diminuer leurs ressources en miel. Il ne s’agit pas de prédation directe. Mais leurs vols stationnaires limitent les allers-retours des abeilles. Pour un apiculteur, il est désolant de retrouver une colonie dévastée. Mais il me semble plus pertinent de mettre des moyens financiers sur de l’accompagnement à des méthodes de conservation des abeilles plutôt que sur la destruction des nids de frelons asiatiques. »

Comment réguler sa présence ?

« A-t-on réellement besoin de faire des efforts pour réguler cette espèce qui est aujourd’hui intégrée dans son écosystème ? Le frelon asiatique s’organise en fonction des ressources disponibles. Forcément, si on aligne 100 ruches, il va se présenter en densité. »

En dehors des abeilles, a-t-il un impact sur la faune ?

« Rien ne le démontre. Le déclin de la biodiversité est dû au développement des pièges qui sont délétères, notamment pour les papillons et les coléoptères. Aucun piège n’est réellement calibré pour piéger uniquement les frelons asiatiques. »

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